J’ai honte pour mon école. BFMTV nous apprend qu’une école de Mennecy, dans l’Essonne, tout récemment, a fait appel à la gendarmerie pour « une formation pour protéger les enfants aux risques du net ». Sic. Et resic.
J’ai honte.
J’ai honte pour le professeur des écoles qui a décidé d’infliger à ses jeunes élèves de CM2 le discours lénifiant et anxiogène d’un gendarme, aussi averti soit-il sur le sujet.
J’ai honte pour le directeur de l’école, l’inspecteur de circonscription et le directeur des services départementaux qui, en donnant leur accord à cette mascarade, se sont faits complices d’un tel gâchis.
J’ai honte pour le maire de cette ville qui a joué avec la sensibilité des jeunes enfants de ses administrés pour une vulgaire opération politico-commerciale parrainée par une compagnie d’assurance qui ne recule vraiment devant rien pour porter jusque dans les classes sa vitrine publicitaire, au mépris de la neutralité de l’école.
J’ai honte pour notre gendarmerie qui ose traiter des « dangers d’Internet » comme elle parle des dangers de la route.
J’ai honte pour les médecins et infirmières scolaires qui osent parler aux élèves d’Internet comme on parle de l’alcoolisme ou des MST.
J’ai honte pour tous les professeurs des écoles, collèges ou lycées de France, incapables de répondre eux-mêmes aux préoccupations ou aux attentes de leurs élèves, incapables aussi d’intégrer dans leur enseignement et de valider les compétences du Brevet Informatique et Internet ou B2i, aussi imparfait soit-il, qui préfèrent se décharger et faire appel à d’obscures officines qui ponctionnent les subventions publiques et amassent de l’argent en attisant la peur à propos d’Internet.
J’ai honte pour tous les chefs d’établissement ou inspecteurs pédagogiques qui valident sans sourciller de telles démarches anti-éducatives.
J’ai honte pour tous ceux, au ministère, qui se sont rendus complices d’un tel déni d’éducation en labellisant ces lamentables et nocives boutiques, dont tous ceux qui travaillent sur l’éducation aux médias ont déjà raconté les méfaits.
J’ai honte pour les mêmes, au ministère, dans les cabinets et services, qui ont permis qu’une compagnie d’assurance privée s’associe à la gendarmerie pour prendre en charge l’éducation à l’Internet, de la manière la plus négative qui soit, à la place des professionnels de l’éducation.
J’ai honte pour mon école.
Pour le reste et y voir plus clair, je vous recommande la lecture de l’excellent article « Le permis Internet en CM2, dérives dans l’Éducation nationale » co-écrit par Stéphanie de Vanssay et Anthony Lozac’h sur le blogue L’école de demain.
Michel Guillou @michelguillou
Crédit photo : LisiaolongFuko via photopin cc
[cite]
Laisser un commentaire